mercredi 3 mai 2023

Je t’en prie

Ne comparons pas nos peines

Nos vies, à travers nos veines

L’amour que tu as su faire

Le chagrin dont j’ai souffert


Je n’ai pas versé de larme

Je survis dans le vacarme

Que son absence désarme


Ne crois pas que mon silence

Dise mon indifférence

On ne vit pas sa souffrance

Tous avec la même danse.


Ne comparons pas nos haines

Nous n’y trouverions que chaines

Robe noire de nos dégaines

Déguisant notre semaine


Je veux vivre à perdre haleine

Affamée plus qu’une hyène

Pour jouer encore la scène


La nuit, à l’heure où les sirènes

Crient pour ceux que l’on emmène

Je donnerais Rome, Athènes

Pour un frisson dans l’arène.


Je chanterai les murènes,

Où sont nos valses de Vienne ?

Et Étienne, Étienne, Étienne !


Là ! Tu le tiens ?


Ne comparons pas nos peines

Ma douleur vaut bien la tienne

Ta douleur vaut bien la mienne

On va manquer d’oxygène


Avant que la fin ne vienne

Vivons nos plaisirs sans gêne

Vois venir la vulve reine !


Toi qui vénéras l’hymen

Tu t’es mis au gynogène

Et, souveraine lesbienne

C’est toi dis quand on ken !


On ne sait pas la souffrance

Comme on mesure une audience

Ni sous le fracas des bombes

Lesquels creuseront leur tombe ?


Dans les rayons de lumière

Nous retournerons poussière

A quoi bon faire la fière ?


Fi de Rimbaud, de Verlaine

De nos lamentations vaines

S’il est bien temps de mourir,

Il est surtout temps de jouir.


Aujourd’hui plus que chrétienne

L’Europe est américaine

À quoi bon des rockets en ces temps de détresse ?


Ne comparons pas nos manques

Nos versets de saltimbanques

Qui n’a ressenti l’absence ?

Qui en comprendra le sens ?

Qui n’a rêvé d’un retour

Toi tu serais son amante

Toi le voisin que l’on chante

Toi son pote de toujours


Qui n’a bu de ces ivresses

Les souvenirs de jeunesse

Et des fêtes turbulentes

Combattu les vagues lentes


Avant d’enterrer nos rêves

Et juste avant que l’on crève

Écorchés et irradiés,

Nos corps nus entrelacés

Jusqu’aux confins de l’oubli

Entonnons le chant radieux

Savourons jusqu’à la lie

Le grand jour de nos adieux.


RXINA, Maubuisson, 30 avril 2023

(Pour Patti)

Ils ont désenchanté le monde

Ils nous ont pris nos rêves,

En ont fait des projets

Et de nos illusions

Des films à gros budget

Ils ont séché nos larmes,

Refusé nos prières

Et sur notre insouciance

Allumé les lumières


Ils ont nommé nos peurs,

Révélé nos phobies

Exploité nos données,

Vendu nos vies privées

Braqué les projecteurs

Sur nos intimités

Éclairé nos ténèbres,

Nos souvenirs enfouis


Ils ont détruit la vie

Désenchanté le monde

Il nous reste la nuit

Dans la forêt profonde

Il nous reste l’oubli

Pour enterrer l’immonde

Peut-être un peu de pluie

Sous l’orage qui gronde


Vous mes parents vous êtes loin

Et mon plus beau désir

N’est plus rien qu’un besoin

Ils ont désenchanté,

Désenchanté le monde

Et l’ont mis en partage dans le fracas des ondes


Il nous restait l’Amour

Ils en ont fait des feux

Ils ont pris notre ennui,

Vendu notre attention

Calibré nos profils,

Visés en tant que cible

Créé l’économie

Du cerveau disponible


Il nous restait l’espoir

Et le droit à l’erreur

Ils ont tué l’espoir

En nous disant plus forts

Pour instiller le doute

Ils ont percé les cœurs

Qu’ont-ils fait de nos joies

Et nos iles au trésor ?


Ils ont détruit la vie

Désenchanté le monde

Il nous reste la nuit

Dans la forêt profonde

Il nous reste l’oubli

Pour enterrer l’immonde

Peut-être un peu de pluie

Sous l’orage qui gronde


Ils ont désenchanté,

Désenchanté le monde

Et l’ont mis en partage dans le fracas des ondes

Vous mes enfants vous êtes loin

Et mon plus beau désir

N’est plus rien qu’un besoin.


Maubuisson, 30 avril 2023, 19 h10

dimanche 27 mars 2022

Lueur d'enfance

Mon enfance, nichée au fond de moi, ne s’éteint jamais.

C’est un cœur qui bat, une étoile qui brille, un quartz qui vibre.

La force est là. La confiance aussi. L’amour que j’ai reçu est éternel.


mardi 3 novembre 2020

Vers de Terre

Vers de Terre


Que restera-t-il après la fin ?

Qui témoignera de nos vies d’étincelles ?

Pour quels cœurs innocents bruisseront nos histoires

Quand nos enfants cyborgs feront régner la perfection nouvelle ?


Courons nous enjailler au front de nos destins

Nul ne doit reculer face à ces faux pantins

La mer est en reflux aux lambeaux de la Terre

Et c’est vers un radeau immobile et désert

Que nagent par flopées tous ces bras qui s’agitent

Perdus dans la pampa si froide et submergeante

Des corps agglutinés, des plaintes englouties

Tel un aigle englué au nid de la falaise,

L’agonie de l’église languissant d’aiguiser

La goulue glauque anguille a glissé dans la glaise

L’illusion d’un refuge leur donne un gout amer


Que restera-t-il après la fin ?

Qui témoignera de nos vies d’étincelles ?

Pour quels cœurs innocents bruisseront nos histoires

Quand nos enfants cyborgs feront régner la perfection nouvelle ?

vendredi 26 octobre 2018

Réconfort d'enfance

La flamme est bleue sur la bougie
Un éclair blanc en pleine nuit
      Mais il lui semble
      Que l'enfant tremble

Elle,
Si douce et maternelle
      Console
Lorsque
La nuit surnaturelle
      Enjôle
Rend les âmes folles
Douces et faibles
      Si chaudes

La flamme est haute sur la bougie
Et sur son cœur il se blottit
Il fait tout gris
Mais elle sourit
Elle est sa mère, elle est sa fille
Son amie, son amante aussi
Et ce court instant réunit
Les âges de toute leur vie.

La flamme meurt sous son habit
Le rêve aussi a ses lubies
Éphémère comme une bougie
C'était beau, c'est déjà fini
Il fait froid juste après la pluie.

14 août 1980
Ce poème est dédié à Guilhome et Dorothée.

La passe

Comme le soldat inconnu
L'enfant de la balle perdue
Lumière tamisée revenue
S'étire et cirque dans la rue
Comme le soldat inconnu
L'enfant de la balle perdu
Répète le texte inachevé
D'une tragédie obligatoire
Comme le soldat inconnu
L'enfant de la mère ventrue
Commun mort-né dans son étuve
Comme le soldat inconnu
Ta peau mouillée sur sable chaud
Comme le soldat inconnu
Chat brûlant de toucher ton corps
Comme le soldat inconnu
Lame en fer froid coupant la glace
Comme le soldat inconnu
Comme le soldat inconnu

Comme le soldat inconnu
L'enfant de la balle, perdue
Cherche un ami dans la nuit nue

30 novembre 1982

Canettes

En attendant la nuit
J'ai ligoté mon foie tremblant
Au fond des liqueurs noires
De mon ventre
Nous avons bu toutes ces sueurs blanchâtres
Et maintenant
Je me noie dans cette
Décharge publique de
Soleils refroidis
Presque tous aussi beaux
Que des cadavres
De canettes de bière
Brûlant à la lumière
De nos yeux engourdis
Profonds et déjà loin
Ailleurs ...
Au cœur de cette profondeur opaque
J'ai allumé la mèche
D'un piège irréversible
Les mots exploseront
Il est tard maintenant
Ma nuit n'est toujours pas là
Je sais qu'elle ne viendra plus
J'ai oublié de t'attendre ...

22 avril 1982, Savignac-les-Églises